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Abdelaziz Bouteflika envisage de durcir la législation.

29 juin 2006

Abdelaziz Bouteflika envisage de durcir la législation.

Le président algérien fustige les binationaux
Arezki Ait-Larbi
Publié le 29 juin 2006

Abdelaziz Bouteflika envisage de durcir la législation.

«ILS VIENNENT avec le passeport rouge et narguent le consulat algérien en demandant des visas !» Alors qu'il haranguait, dimanche, ministres et walis (préfets) réunis pour faire le point sur les projets de développement, le président Bouteflika a brusquement dérapé sur les binationaux algéro-français, coupables, selon lui, de mépris envers leur pays d'origine.

Par précaution ou par provocation, nombre de ceux qu'on appelle encore les «émigrés» préfèrent, depuis quelques années, revenir au pays sous «protection» française. Surtout pour leurs déplacements professionnels. L'Algérie ne reconnaissant pas la double nationalité sur son sol, ils veulent être traités comme des Français en cas de problème. «Qu'ils viennent nous faire profiter de leurs compétences, nous les paierons comme des étrangers, s'ils le souhaitent. Mais qu'ils arrêtent de nous prendre de haut !» s'est emporté le président Bouteflika.

Assis entre deux chaises, déchirés entre deux cultures, les binationaux sont souvent au coeur du contentieux franco-algérien. Et des polémiques internes. «Pas tout à fait français» en France, ils sont parfois stigmatisés pour leurs origines «musulmanes». «Renégats» en Algérie, ils sont accusés par les islamo-nationalistes de «propager la culture et les moeurs occidentales», synonymes pour eux de dépravation.

Les célébrités ne sont pas épargnées. La romancière Assia Djebbar est entrée, la semaine dernière, à l'Académie française accompagnée par l'indifférence officielle et les sarcasmes de journaux arabophones. Malgré le rappel de la «plaie de la colonisation» lors de son discours de réception parmi les «immortels», on lui dénie son «algérianité». Quand à Zinédine Zidane, fils d'un immigré kabyle, il est coupable selon certains éditorialistes de «dédaigner les couleurs nationales pour défendre le drapeau français».

Après avoir longuement déploré «la perte des valeurs patriotiques chez les jeunes, qui devraient pourtant être fiers d'être algériens», le président Bouteflika a dénoncé ses prédécesseurs, qui ont laissé le choix aux binationaux d'accomplir le service national dans l'un des deux pays. Puis il a cité l'exemple de la Mauritanie, «qui retire sa nationalité à tout citoyen qui acquiert celle d'un autre pays». Suivra-t-il cet exemple ? Sans annoncer une réforme du Code de la nationalité, il a averti : «Celui qui détient un passeport étranger ne peut avoir en même temps le passeport algérien.»

«Coopérants techniques»

Si les binationaux hexagonaux sont visibles, on connaît moins bien ceux d'Algérie, beaucoup plus discrets. Qui sont-ils ? Combien sont-ils ? Faute de statistiques, le consul général de France à Alger a révélé il y a deux semaines un chiffre éloquent : 100 000 demandes de «réintégration dans la nationalité française» ont été enregistrées en 2005. Pour étayer leurs dossiers, des candidats évoquent un aïeul, soldat dans l'armée française durant l'une des deux guerres mondiales. D'autres n'hésitent plus à réhabiliter un vieil oncle harki, rejeté jusque-là comme «la honte de la famille».

Sur un terrain sensible, favorable aux surenchères populistes, c'est sans doute ce désir de nombreux Algériens de «redevenir français» qui a déclenché le courroux présidentiel. Signe d'«apaisement des tourments de l'histoire» pour les uns, de «revanche de la France coloniale contre la révolution algérienne» pour d'autres, cette évolution des mentalités est récupérée par les milieux ultranationalistes, qui accusent, depuis des années, les binationaux d'être «la cinquième colonne du néocolonialisme». Des associations ont même revendiqué leur exclusion des responsabilités politiques et de la haute fonction publique. Le président Bouteflika vient de leur donner raison en déclarant : «Je ne connais aucun pays au monde qui donne des postes de souveraineté à des binationaux.»

Trop galvaudé par le discours officiel, le patriotisme sonore ne fait plus illusion auprès de la population. Pour les familiers du sérail, cette charge présidentielle contre les binationaux vise à occulter le statut de «coopérants techniques avec résidence hexagonale» de certaines notabilités du régime. Jouissant de la double nationalité et pris en charge dans des palaces algérois, ils ont mis leur famille à l'abri en France, où ils ont scolarisé leurs enfants. D'autres font la navette entre Alger, où ils exercent des fonctions officielles, et Paris ou Marseille, où ils sont propriétaires de commerces, notamment dans l'hôtellerie et la restauration.

Source : Le Figaro 29.06.06

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